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Jean Louis Raduit est né le 16 août 1608 dans une famille de petite noblesse huguenote dans la ville portuaire de La Rochelle. Le personnage le plus important de la famille était, sans doute, le grand-père maternel, Louis de Bourdigale, qui a occupé le poste de Procureur du Roi.

Jeune homme, il a participé au siège de sa ville natale qui a duré plus d´un an (1627-1628). Cette expérience malheureuse lui a cependant été utile, plus tard, en 1645, lors du siège de Brno. Il s'agit en effet de l´événement qui a influencé fondamentalement sa carrière militaire.

Après la reddition de la ville (1628), il n'est pas parti pour la Nouvelle France comme la plupart de ses compagnons d´armes, mais il s´est laissé embrigader par l'armée suédoise, notamment parce que cela lui permettait de continuer à pratiquer son culte protestant et de trouver, ainsi, un refuge convoité par de nombreux protestants de l'époque. Une autre raison pour laquelle il a embrassé la carrière militaire et est devenu un acteur de la guerre de Trente Ans est le fait, qu'en tant que fils puîné, il avait peu de chance de se voir transférer la gestion des terres familiales.

Dans les rangs suédois, il est entré sur le territoire de l'Allemagne d'aujourd'hui, comme un calviniste fuyant la colère du cardinal de Richelieu. Il est devenu un protégé d'un autre Français, le baron Jacob de la Gardie, un homme influent du royaume suédois. Raduit de Souches, en plus de son talent militaire et de son courage, était très instruit et lettré, ce qui lui a permis d'avoir des amis influents. Mais, il était irascible et, dans ses comportements, pouvait « s'enflammer », y compris contre ses supérieurs, d'autant plus qu'il était convaincu de « son infaillibilité » du fait de sa culture générale. Ces traits, au contraire, lui ont apporté beaucoup d'ennemis et ont nui, parfois, à sa prometteuse carrière.

En septembre 1634, il a participé à la bataille près de Nördlingen, la première grande défaite des Suédois. Au début, il semble qu'il ait occupé les postes militaires les plus bas dans l'armée du roi Gustav II Adolf puis de la reine Christine, ce qui lui a, cependant, servi d´école militaire grandeur nature. En 1635 il a été nommé officier, en partie grâce à son protecteur, puis il a été détaché en Poméranie avec son régiment. En 1636, il a participé aux combats pour la ville de Stargard en Pologne actuelle, où des traits de son caractère négatif se sont montrés, critiquant ouvertement son supérieur et risquant une cour martiale. Il a préféré quitter l'armée suédoise plutôt que de se soumettre.

En 1636 il est revenu en France, son pays natal, allié de la Suède, jusqu'en 1639. Il a essayé d'obtenir une fonction dans l'armée royale française. Ses protecteurs et partisans, y compris le chancelier Oxenstierna ont signé, au nom de la reine Christine en 1637 à Stockholm, une lettre qui résumait ses actes héroïques. Il a attendu un an et demi pour une audience auprès du roi Louis XIII. Quelles que soient les propositions qui lui ont été faites, Raduit de Souches ne les a pas acceptées immédiatement et a demandé l'avis du chancelier Oxenstierna. Puis, sans même attendre la moindre réponse, il est retourné en Suède et a poursuivi sa carrière où il l´avait laissée.


En 1639, lors de son retour dans l'armée suédoise, il a été nommé colonel et a obtenu le commandement d´un régiment de dragons avec lequel il a été envoyé en Silésie. Là, il a fait connaissance de l´élite de l´état major suédois comme Charles Gustave Wrangel, Torsten Stalhans ou Lennart Torstensson. Au fil du temps, Raduit de Souches, de nouveau, a échoué à dompter sa nature et a ouvertement critiqué son supérieur direct, le général Stalhans (ou Stalhandske). Ce dernier ne s´est pas laissé faire et Raduit de Souches a, de nouveau, été convoqué devant la cour martiale. Selon certaines sources il semble même qu'il se soit battu en duel avec son général. Raduit de Souches a compris qu'il n'avait plus d'avenir dans l'armée suédoise et il s´est enfui en juin 1642.

Pour revenir en France, il a décidé de passer par Vienne. Il y a rencontré le frère de l´empereur des Habsbourg Ferdinand III : Leopold-Guillaume, évêque d'Olomouc, de Strasbourg, archêveque de Magdeburg et commandant de l´armée impériale qui a décidé d'utiliser ses connaissances du parti suédois. Dès le 1er octobre 1642, il est nommé colonel de dragons et envoyé en Silésie, cette fois dans l'armée impériale.

Après un changement dans le haut commandement de l'armée suédoise et leur bataille victorieuse près de Leipzig en 1642, la voie en Bohême s´est ouverte devant les Suédois. La monarchie des Habsbourg avait besoin d'augmenter fortement les effectifs de son armée et cherchait partout les hommes capables à tous les niveaux. L'armée formait un monde à part obéissant directement à l'empereur et recrutait ses officiers étrangers comme bon lui semblait. Le recrutement de Raduit de Souches n´était donc pas un cas isolé.

De Souches, dans l'armée impériale, s´est fait brillamment remarquer durant le siège de la ville d´Olomouc, occupée par les Suédois depuis 1642. Bien que le plan pour libérer la ville ait échoué en raison de sa divulgation, son acte héroïque a favorisé sa renommée à la Cour de Vienne. Pour récompenser son courage, l'empereur Ferdinand III l´a nommé commandant de la défense de la ville de Brno, le 14 mars 1645.

Après la défaite des armées impériales près de Jankov, les Suédois se dirigeaient sur Vienne. Mais Brno, avec sa forteresse de Špilberk (Spielbeg), leur faisait obstacle. Les Suédois avaient le contrôle d'endroits stratégiques en Moravie du Sud et dans une partie de la Basse-Autriche. Aussi, si la ville de Brno tombait, la monarchie serait doublement touchée car les forces suédoises pourraient se tourner, non seulement contre Vienne, mais aussi contre Presbourg (nom de l'époque, Bratislava aujourd'hui), capitale du royaume de Hongrie.

Les chances de mener à bien sa défense étaient minimes et Raduit de Souches savait que, s´ il tombait dans les mains de l'ennemi, à savoir ses anciens compagnons d´armes, ceux-ci n´auraient pas de pitié pour lui. Il n'avait que 1476 hommes sous son commandement dont, seulement, 426 soldats professionnels. Les Suédois, par contre, étaient 28.000 et, en attente de 12.000 hommes du prince transylvain, Georges I Rakoczi, en renforts. Raduit de Souches est arrivé à Brno le 15 mars et, grâce à son comportement énergique, a gagné la confiance des Brnois. En six semaines, il a préparé la défense de la ville. Il l´a approvisionnée en armes, en nourriture, il a fait réparer les remparts, fait creuser des fossés ainsi qu´une tranchée couverte, strada cooperta, pour assurer la communication entre la ville et la forteresse de Špilberk. Pendant le siège, qui a duré 112 jours - du 3 mai au 23 août 1645, il a appliqué, pratiquement, les mêmes principes qu´il a connus, dans sa ville natale, à La Rochelle, 18 ans plus tôt. Le jour décisif pour la victoire a été le 15 août, jour de la fête de l'Assomption de la Vierge Marie, quand les Suédois ont effectué une attaque générale en attaquant à six endroits différents. Grâce à l'excellence du commandement de Raduit de Souches, â la bravoure et â la détermination de tous les défenseurs, Brno s'est défendue avec succès. C'est la seule ville de Moravie à avoir réalisé cet exploit. L'armée suédoise s´est retirée à la fin du mois d'août. Et le général Lennart Torstensson, meurtri, a, par la suite, renoncé au haut commandement. Le succès de la défense de Brno signifiait le sauvetage de Vienne et le salut de toute la monarchie des Habsbourg.

Les pertes suédoises étaient énormes - 8.000 hommes, tandis qu'elles ne s'élevaient qu'à 250 hommes tués et 150 blessés du côté des défenseurs. L'empereur Ferdinand III a récompensé généreusement le commandant de la ville et tous les autres défenseurs de la ville. Raduit de Souches a ainsi, contribué, à l'armistice de la guerre de Trente Ans et a empêché les Suédois de provoquer la défaite définitive de la maison des Habsbourg. Voir aussi Les traces de Raduit de Souches  - Brno.

Après la réussite de cette défense héroïque qui l'a rendu célèbre, la carrière de Raduit de Souches a grimpé en flèche. En 1645 il a été promu général et commandant militaire de la Moravie. Un an plus tard, il a été élevé au rang de libre seigneur (titre de la haute noblesse).

En 1648, il a été promu maréchal de Moravie et, sa fonction de commissaire impérial, lui a permis de superviser le départ des Suédois de la Moravie. En tant qu'expert reconnu des fortifications, il a pris part à la restauration des défenses des villes royales, notamment celles de Brno et d´Olomouc. En 1658, en tant que général d'artillerie, c'est-à-dire commandant de toute l´artillerie, il a contribué à repousser les Suédois de Poméranie, ce qu'il a réussi en grande partie (conquête de Cracovie en 1657, puis celle de Torun en 1658).

Après la mort de Georges Ogilvy, son compagnon d'armes lors de la défense de Brno, il a assuré le commandement de la forteresse de Špilberk, de 1661 à 1664. Il a été anobli en 1663.

Pour faire face à une menace de l'empire ottoman, Raduit de Souches a obtenu une nouvelle mission : arrêter la pénétration des Turcs dans le sud-est. Il a libéré Nitra, Levice (Lewenz) et s'est même battu à Esztergom. Il a réussi à refouler les Turcs au-delà du Danube. En 1664, il a été nommé colonel de la forteresse de Komárno (Komárom) près de la frontière et commandant des villes minières de la Slovaquie actuelle. Il a fait restaurer et renforcer les vieux forts. Il en a même fait construire de nouveaux. Il a participé à la construction d'une nouvelle citadelle appelée Leopoldov en l'honneur de l'empereur Léopold Ier.

A Vienne, en 1665, il a reçu un mandat politique dans l´administration de l´Empire et est devenu conseiller secret. En 1668, il a été nommé commandant de la garnison de ville de Vienne. Il s'est, alors, consacre, à ce qu'il sait le mieux faire : les fortifications. Pendant son séjour à Vienne il réside dans son palais, au centre-ville, derrière l'église Saint Etienne, au numéro 16 de Singerstrasse, aujourd'hui le palais Breuner.

La dernière campagne militaire l'a conduit aux frontières de sa France natale, dirigée alors par Louis XIV. L´Autriche ainsi que l'Espagne avaient apportées leur aide aux Provinces-Unies (la Hollande) qui étaient en guerre contre la France depuis 1671. En 1673, Raduit a été envoyé au combat à la tête de l'armée impériale, composée de 21.000 hommes.Sur le territoire de la Belgique il a participé à la bataille la plus sanglante de la guerre de Trente Ans, la bataille de Seneffe où 20.000 hommes ont été tués ; le comble étant que le résultat de cette bataille a été indécis. Pendant la bataille, Raduit s'est disputé avec le commandant des alliés, Guillaume d´Orange III qui, à son retour à la cour de Vienne, s´est plaint de lui. Raduit de Souches a rapporté du monastère, près de Dinant, en Belgique, une statuette précieuse de la Vierge Marie de Foy. Voir Les traces de Raduit de Souches - Moravie du Sud.La tentative de réhabilitation, qui a duré jusqu'en 1676 se termine par un échec, obligé de rester sur ses terres et démis de ses fonctions militaires sauf la fonction politique - conseiller secret.

Le maréchal vieillissant atteint d´une maladie oculaire et mentale meurt le 12 août dans son château de Jevišovice avant l´âge de 74 ans.

Descendance

Raduit de Souches a été deux fois marié. Avec sa première épouse, Anne Elisabeth de Hoffkirchen qu´il avait épousée bien avant le siège de Brno, avait quatre enfants - deux filles et deux fils. Peu de temps avant la mort de sa première femme tous deux ont été promus au rang de compte en 1663. Sa deuxième femme, Anne Salomé d´Aspermont- Reckheim, de 40 ans plus jeune que lui. Il l´a épousée 14 ans aprês en 1677. Leur fils unique est mort peu après la naissance.

Ses deux filles de son premier mariage se sont mariées dans la famille des Thurn ou plutôt celle des Puchheim. Le successeur de la famille était le fils cadet de Charles Louis car le fils aîné, Jean Louis, a été déclaré faible d'esprit. Charles Louis suivant les traces de son père est devenu maréchal. Le métier militaire, cependant, lui a été fatal et il est mort dans les combats contre les Turcs en 1691. Le seul descendant mâle de Charles Louis, Charles Joseph, n'a pas eu de chance car de ses six enfants n´ont survécu jusqu'à l'âge adulte que deux filles. Ainsi, la famille de Souches est morte par l'épée. Le patrimoine de Jevišovice a été pris par Marie Wilhelmine, qui a épousé Jan Nepomuk, comte Ugarte, d´origine d´espagnole.

En 1935 la famille s´éteint même dans la lignée féminine quand la branche de Jevišovice disparaît. La famille continue indirectement à travers les comtes de Bohême de la famille Chotek et à travers les princes italiens Dentice di Frasso. Ceux derniers ont possédé le patrimoine de Kravsko dans le district de Znojmo jusqu'à la réforme agraire de 1948. Les descendants de l´illustre ancêtre vivent dans le sud de l'Italie jusqu'à aujourd'hui.